Émergence et transformations du puritanisme en Angleterre, 1559-1642

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Version du 25 mai 2023 à 07:59

Question de civilisation britannique (tronc commun) au programme de l'agrégation externe et interne en 2023 et 2024.

Texte de cadrage

Présentation générale du sujet

Le sujet proposé porte sur l’émergence, la définition et l’évolution du puritanisme en tant que courant politique, religieux et culturel depuis son apparition au début du règne d’Élisabeth Ière (1558-1603) avec le « Règlement élisabéthain » (Elizabethan Settlement, 1559), jusqu’à son apogée au début des années 1640, au seuil des guerres civiles qu’on a aussi parfois appelées « Révolution puritaine ».

En 1563, le clergé, réuni en assemblée (Canterbury Convocation), formule les Trente-Neuf Articles qui seront finalement révisés en 1571, adoptés par le Parlement puis imposés à l’ensemble du clergé. L’ambiguïté de ces Articles sur un certain nombre d’aspects de la doctrine provoque le mécontentement de ceux qui sont partisans d’une réforme complète de l’Église, afin qu’elle se distingue plus radicalement du catholicisme. Ainsi, en 1572, deux jeunes ministres londoniens, John Field et Thomas Wilcox, rédigent An Admonition to the Parliament pour dénoncer les concessions faites au catholicisme dans l’Église d’Angleterre et proposer une organisation presbytérienne, inaugurant ainsi une controverse célèbre à laquelle prennent part Thomas Cartwright et John Whitgift (Admonition controversy).

Face aux refus répétés de la reine et du Parlement, le mouvement de contestation s’organise et élabore des stratégies pour se faire entendre, comme en témoigne la controverse de Marprelate en 1588-1590, au cours de laquelle est imprimée, par des presses secrètes, une série de pamphlets anonymes s’attaquant en particulier au gouvernement de l’Église d’Angleterre par des évêques et proposant à la place un système presbytérien. Ces publications conduisent à un renforcement de la répression et lorsque Jacques VI d’Écosse accède au trône d’Angleterre (1603-1625), ceux qu’on appelle désormais couramment les puritains espèrent que le nouveau souverain Stuart se montrera plus conciliant. Cependant, la Pétition des Mille (Millenary Petition) qu’ils lui soumettent dès 1603 pour obtenir de nouvelles réformes de l’Église d’Angleterre ne reçoit pas les réponses attendues lors de la Conférence d’Hampton Court qui s’ouvre en janvier 1604, même si une nouvelle traduction de la Bible (King James Bible, 1611) y est décidée.

Malgré la victoire doctrinale du calvinisme au plan international lors du synode de Dordrecht (1618), les revendications religieuses des puritains, dont leur opposition aux Books of Sports (1618 et 1633), restent lettre morte en Angleterre. Tout au long du règne de Jacques (VI d’Ecosse / Ier d’Angleterre), mais surtout de son successeur Charles Ier (1625-1649), le conflit entre le mouvement puritain – de plus en plus présent au sein même du Parlement – et la monarchie se durcit. Les membres puritains du Parlement désapprouvent la politique des deux souverains, en particulier la réaffirmation du droit divin des rois (qui les fait user trop souvent de la prérogative royale, aux yeux de leurs détracteurs), l’arminianisme et les « innovations » de William Laud (1573-1645) qui conduisent, entre autres, à de vastes projets d’embellissement des lieux de culte. Devant la censure, certains puritains s’exilent, sur le continent ou en Amérique du Nord, où ils fondent leurs propres communautés religieuses, à Plymouth en 1620, puis à Boston dix ans plus tard ; d’autres commencent à expérimenter des modes d’organisation ecclésiale séparément de l’Église d’Angleterre. L’opposition politique des puritains au sein du Parlement d’Angleterre se renforce et s’organise au cours du règne de Charles Ier, au point de conduire à un conflit armé, opposant parlementaires et royalistes tout au long des années 1640, suite à la tentative d’imposer le Livre des Prières Publiques en Écosse.

L’étude de l’émergence et des transformations du puritanisme aux XVIe et XVIIe siècles ne saurait ainsi se limiter rigoureusement à l’Angleterre seule, comme en témoignent par exemple l’influence de John Knox et le presbytérianisme de la kirk, les massacres de 1641 en Irlande, ou encore les migrations transatlantiques des puritains. Les circulations au sein des îles Britanniques et dans l’espace atlantique constituent ainsi un cadre global qui éclaire et met en perspective les dynamiques anglaises, qui restent cependant le cœur du sujet.

Trois axes d’étude principaux

La périodisation retenue n’inclut pas les guerres civiles, dont l’issue marque la victoire des puritains, mais se termine en 1642, au moment où la suppression de tribunaux comme la Chambre étoilée et l’affaiblissement de la censure encouragent l’essor des sectes radicales, et où le Parlement réussit à convaincre la nation de souscrire à sa « Protestation » pour la défense de la religion protestante. À cette date, la puissance et la force de frappe des puritains, qui parviennent à constituer une armée contre la monarchie, ne font aucun doute. Trois grands axes seront étudiés à part égale. Le premier porte sur (1) l’essor remarquable du puritanisme qui n’est au départ que l’expression, souvent modérée ou en tout cas marginale, d’un mécontentement face à une Église d’Angleterre jugée encore trop proche du catholicisme, mais qui devient, au milieu du XVIIe siècle, un mouvement théologico-politique capable de mobiliser et d’unir les opposants à la monarchie Stuart, malgré la diversité de leurs origines et de leurs revendications doctrinales, organisationnelles et liturgiques. Il s’agit donc de s’intéresser à la montée en puissance du puritanisme tout en soulignant qu’il ne s’agit pas d’une évolution progressive et régulière vers une prise de pouvoir, mais bien d’un essor souvent entravé et remis en question.

Le deuxième axe porte sur (2) la définition même du puritanisme et sur l’identité des puritains. Présenté comme un mouvement, comme une doctrine ou comme un mode de vie, le puritanisme n’est sans doute pas une religion en soi. Mais surtout, il ne s’agit pas d’un phénomène homogène, qui rassemblerait des individus partageant tous les mêmes croyances et les mêmes pratiques religieuses. Le terme péjoratif « puritain » apparaît en 1565, à l’occasion d’une querelle sur les vêtements sacerdotaux (vestiarian controversy). Polémique et malaisé à définir, il recouvre des réalités diverses : il n’y a pas grand-chose en commun, apparemment, entre les puritains modérés qui promeuvent la réforme au sein même de l’Église d’Angleterre dans la première moitié du XVIIe siècle, les congrégationalistes et les séparatistes. Pourtant, les puritains ont des positions religieuses et politiques identifiables, dictées par leur opposition franche au catholicisme : sur le plan religieux, ils condamnent certains rites de l’Église d’Angleterre et réclament une réforme des institutions ; sur le plan politique, ils prennent position contre l’Espagne papiste et la prérogative royale pour promouvoir le Parlement et le bien public. On a pu dire que le puritanisme se distinguait du protestantisme en termes de degré davantage que de nature, caractéristique qui a sans doute conduit au stéréotype du puritain extrémiste et fanatique, ainsi que par certains traits des « sectes religieuses » du second XVIIe siècle, que l’on associe parfois à ce mouvement.

Le troisième axe porte sur (3) l’histoire sociale, culturelle et matérielle du puritanisme à trois échelles : communautaire, familiale et personnelle. Si le mouvement puritain occupe une place essentielle dans l’histoire politique et religieuse de la première modernité, il est aussi important de s’intéresser aux puritains eux-mêmes, à leurs origines sociales et géographiques, à leur mode de vie ou encore à la place des femmes au sein du mouvement.

La culture puritaine est d’abord marquée, du point de vue collectif, par la centralité accordée au texte biblique, au strict respect du repos dominical, et par des pratiques communautaires comme les sermons, le chant des psaumes, les exercices liés à la prédication (prophesyings, lectures), la prière ou encore le jeûne. Ces pratiques se déroulaient dans des lieux dépouillés d’ornements visuels ou auditifs, les querelles sur les vêtements, les images ou la musique ayant ponctué la période considérée. Les puritains se distinguent également par les rites entourant la naissance et la mort, par la façon de célébrer le mariage, de se nommer ou de se vêtir. Cette altérité revendiquée permet de comprendre les stratégies de contrôle social et de réforme morale qui leur sont associées, jusque dans la sphère économique. Les puritains, souvent issus de l’artisanat urbain ou de la classe marchande, insistent sur l’honnêteté. C’est leur mode de vie ascétique, leur méfiance envers le luxe et l’attention portée à la bonne réputation qui mena Max Weber à déceler chez eux l’« esprit » capitaliste sur lequel il fonde une partie de son œuvre.

Dans la sphère domestique, ensuite, l’éducation est essentielle. À côté des sermons et des ouvrages théologiques et doctrinaux, le clergé puritain est à l’origine d’une littérature dévotionnelle et pastorale (catéchismes, traités de conduite, méditations, arts du bien mourir...). Du point de vue individuel, enfin, l’examen de conscience et la recherche des preuves du salut étaient essentiels. Les puritains tenaient des journaux, composaient des autobiographies spirituelles, échangeaient des correspondances souvent très personnelles.

L’étude du puritanisme et de son histoire, souvent mal connus et victimes de nombreux stéréotypes et contresens alors même que leur héritage politique, religieux et économique continue d’irriguer la culture de pays d’expression anglophone, permet ainsi de mieux comprendre à la fois les fondements de l’Église d’Angleterre et les origines de la suprématie parlementaire au Royaume-Uni, de la liberté de conscience et de la tolérance.

Bibliographies

Liens utiles