Méthodologie pour la Dissertation de civilisation

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Notes prises dans les rapports de jury. Pour voir les sujets concernés : http://agreg-ink.net/index.php?title=Programmes_de_l%27agr%C3%A9gation_d%27anglais_depuis_2010

Sommaire

Dissertation de civilisation 2002

(agreg interne)

Organized crime in fact and on film : repression versus expression


Cette épreuve est avant tout une épreuve de communication par le biais de la page blanche et de l’écriture, de rencontre entre un candidat et un correcteur. Cela commence par la présentation générale, la graphie. De trop nombreuses copies semblent étrangement avoir oublié cet aspect des choses. De même qu’à l’oral les candidats essaieront de trouver ton, inflexion, rythme de parole justes pour « vendre » leur présentation, on attend qu’à l’écrit ces préoccupations soient à l’ordre du jour. Peut-être n’est-il pas inutile alors de s’entraîner à écrire quelques pages à la main pour s’assurer de l’éventuel résultat. Peut-être n’est-il pas inutile de réfléchir avant l’épreuve à la façon d’organiser physiquement sa copie ( transitions entre les parties et sous-parties, passages à la ligne entre paragraphes, utilisation de la ponctuation – nous pensons ici aux titres des films ou ouvrages qui trop souvent disparaissent dans la masse du mépris des règles de graphie ). Peut-être n’est-il pas inutile de penser à l’effet que la copie va produire sur le lecteur (et pas uniquement à cause de son génial contenu). Peut-être n’est-il pas inutile de relire attentivement sa copie avec un œil aussi détaché que possible pour éliminer toutes les erreurs d’orthographe, de répétitions, de constructions de phrases, d’incohérences notoires de raisonnement qu’un premier jet fiévreux peut avoir produit. Ce sont là quelques préoccupations de base qui démontrent un soin et un intérêt pour la communication que le correcteur saura aisément identifier et dont il ne manquera pas de savoir gré au candidat.

Dissertation de civilisation 2004

(agreg interne )

Comment upon the following quotation: "[The special relationship] helped to reinforce the image of Britain as a great power, capable of playing an independent world role. The result […] was that Britain was  
deflected from coming to terms with her European destiny." John Baylis, Anglo-American relations since 1939, Manchester University Press, 1997, pp. 12-13.

Quatre points méritent une attention plus particulière : la construction d’une problématique dès l’introduction, l’élaboration d’une argumentation, le rôle de la conclusion et l’importance d’une expression soignée. Le problème majeur constaté par le jury est la difficulté de passer du placage de connaissances à l’argumentation. Cela suppose une préparation sérieuse, l’assimilation des connaissances afin de pouvoir les déployer au service d’une réflexion personnelle, et un entraînement à l’épreuve de la composition.

L’introduction

  • L’introduction occupe une place stratégique dans une composition : elle définit l’angle sous lequel le sujet est abordé, le cadre dans lequel il sera traité. Il est donc essentiel de s’attacher à analyser les termes du sujet ou de la citation dès l’introduction, afin de bien en percevoir la portée et de prendre une certaine distance.
  • Dans le cas d’une composition en civilisation, il convient entre autres de bien cerner la période à traiter.
  • Une introduction qui aborde la citation d’un point de vue linguistique ou sous un angle pseudo-philosophique, qui ne s’enracine pas dans le contexte historique de la question au programme, révèle une méconnaissance de la nature même de l’épreuve puisque l’épreuve de civilisation suppose une réflexion fondée sur la maîtrise de la question au programme.
  • De même, une simple copie du sujet ou une paraphrase de la citation met en évidence un manque de préparation et d’entraînement. Certaines copies se contentent même parfois de mettre les éléments de la citation à la forme interrogative, puis négative. D’autres se demandent si l’auteur a tort ou raison, mais ne parviennent pas à approfondir l’analyse. Les meilleures copies mettent en relation les termes, identifient et analysent les mots clés, les situent dans un contexte et proposent un fil conducteur qui structure la composition.
  • Dans ce dernier cas, l’annonce d’un plan est en général cohérente avec l’analyse et permet d’approfondir le sujet et d’argumenter de manière pertinente.
  • Plus souvent, les copies étaient articulées autour de termes centraux de la citation. Lorsque ceux-ci étaient simplement juxtaposés, ils ne permettaient guère de cerner la question.
  • Certains plans s’inspirant parfois du programme officiel s’apparentaient davantage à des cadres généraux qui entraînent un étalage de connaissances sans mise en rapport explicite avec le sujet proposé. D’autres enfin ont plaqué une problématique sans rapport évident avec la citation.

L’argumentation

  • Elle découle en partie de l’introduction et du degré d’élaboration de la problématique. Elle est également symptomatique du degré de maîtrise des connaissances qui, bien qu’indispensables à une argumentation pertinente, ne sont pas suffisantes. La plupart du temps les candidats maîtrisent les données factuelles essentielles malgré quelques erreurs. Ces dernières ne portent pas préjudice à la réflexion d’ensemble, et le jury est capable de faire preuve d’indulgence, compte tenu de la masse d’informations à assimiler face à un programme aussi vaste.
  • En revanche, certains événements doivent être connus. La simple mention de quelques dates ne suffit pas.
  • Il est donc indispensable de sélectionner les connaissances pertinentes afin de les utiliser dans le cadre d’un raisonnement, d’une démonstration. C’est la compétence principale qui est évaluée dans cette épreuve.
  • D’autre part, une argumentation trop manichéenne ou simpliste n’est pas non plus satisfaisante, car elle ne permet pas de rendre compte de la complexité des faits historiques. Il faut savoir nuancer ses propos pour faire preuve d’une compréhension fine.
  • Si les connaissances historiques sont bien évidemment la matière première d’une réflexion de qualité, il est recommandé de connaître les positions des principales écoles de pensée historiographiques.

La conclusion

  • L’absence de conclusion est assez fréquente, soit par manque de temps, soit à cause d’une problématisation insuffisante. S’il est légitime, voire recommandé d’élargir le propos par une référence à la suite des événements, il ne faut pas oublier pour autant de reprendre les grandes lignes de la composition, de synthétiser les principales conclusions intermédiaires, afin de faire le bilan de son travail.
  • Cette étape est essentielle car une conclusion réussie peut faire toute la différence entre une copie faible et une copie acceptable. Lorsque la direction d’ensemble a tendance à se perdre au fur et à mesure du développement, une conclusion qui reprend les idées du propos introductif, permet de relier les fils de la réflexion et de faire aboutir la composition, laisse le lecteur sur une impression plus favorable.

L’expression

  • Forme et fond étant étroitement liés, la qualité de l’expression est tout à fait essentielle. Elle couvre plusieurs aspects, qui vont de l’orthographe à la ponctuation, en passant par la mise en page et le vocabulaire. Les bonnes compositions sont rédigées dans une langue précise et claire, voire élégante.
  • Une bonne présentation facilite la lecture et permet de mieux suivre le fil de la pensée. Ainsi, le découpage en paragraphe qui doit être mis en évidence par un retrait en début de ligne doit correspondre à une transition entre deux idées ou deux thèmes importants. De même, la ponctuation, y compris l’utilisation de majuscules et de minuscules, contribue à l’intelligibilité de l’expression.
  • Le vocabulaire utilisé dans les copies a été jugé convenable dans l’ensemble, même si certains termes ne sont toujours pas maîtrisés.
  • Par ailleurs, certaines formes ne sont toujours pas maîtrisées et le temps des verbes est parfois erroné. Il faut signaler à cet égard que le présent de narration, fréquent en français, est à éviter en anglais, du moins dans le cadre d’une composition de civilisation. Quelques mots sont déformés par rapprochement avec le français – redoublement des consonnes.


Le jury a eu le plaisir de noter de nombreuses copies de qualité, fondées sur une bonne maîtrise des connaissances, sur une volonté d’argumenter de manière scientifique, et sur un anglais idiomatique et riche.

Dissertation de civilisation 2010

(agreg externe)

Dissertation - Analysez et discutez : “Rather than simply emphasizing conservatism and continuity, a coherent portrait of Reconstruction must take into account the subtle dialectic of continuity and 
change in economic, social, and political relations as the nation adjusted to emancipation.” Eric Foner, “Reconstruction Revisited,” Reviews in American History, Vol. 10, December 1982, p. 87.
  • Une dissertation doit d’abord démontrer et convaincre à l’aide d’arguments solides, fondés sur des références précises, énoncés et articulés de façon claire et logique. Le sujet de cette année étant un sujet citationnel, il s’agissait de se positionner par rapport au propos de Foner et d’en apprécier la justesse grâce aux connaissances sur la période et ses enjeux, mais aussi sur les débats historiographiques qui l’ont suivie. Le défaut méthodologique le plus souvent observé était la tendance à glisser vers une démarche descriptive ou narrative qui était doublement pénalisante car elle faisait souvent tomber la dissertation dans la récitation de cours et empêchait l’argumentation d’émerger. Le jury n’attendait pas des candidats qu’ils racontent l’histoire de la Reconstruction ou qu’ils se contentent de décrire les tensions raciales ou le ressentiment des blancs du Sud à l’égard des Républicains. Si certaines anecdotes bien choisies peuvent parfois enrichir le propos en l’illustrant, elles ne doivent pas occulter l’analyse : la démonstration doit toujours s’imposer et dominer clairement. Le correcteur doit toujours savoir où le candidat l’emmène, pourquoi, et de quelle façon tel ou tel développement se rattache à la citation, qui doit rester en permanence au coeur du travail. Le flou, dans une dissertation, est un défaut rédhibitoire.
  • Le jury souhaite également attirer l’attention des futurs candidats sur la nécessaire précision des termes employés. Les réalités propres au contexte américain doivent être maîtrisées, et en particulier la connaissance des institutions de ce pays doit être suffisamment précise pour qu’aucune ambiguïté n’apparaisse dans le propos.
  • La toute première chose à faire est de consacrer un temps suffisamment important à l’analyse du paratexte de la citation puisque le nom de l’auteur, la date et la source apportaient des indications précieuses sur la façon de l’aborder. Choisir de survoler cette étape par crainte d’être pris par le temps en fin d’épreuve se révèle être un mauvais calcul dans la plupart des cas. C’est la familiarité acquise avec la pratique de l’exercice qui doit permettre aux candidats d’organiser le temps dont ils disposent de façon adéquate.
  • Ce travail effectué, il fallait ensuite s’interroger sur les termes essentiels de la citation, définir leur sens pour l’auteur (pourquoi emploie-t-il tel terme plutôt qu’un autre ? A quoi fait-il référence précisément ? Les termes qu’il emploie ont-ils un sens particulier pour lui ?) et les recadrer dans le contexte général de la période. Encore une fois, ce travail préalable peut prendre un certain temps mais il se retrouvera dans la copie et le correcteur valorisera ce souci de rigueur. A l’inverse, un candidat qui s’en dispense prend le risque de rédiger une copie où chaque notion fondamentale n’est qu’une étiquette posée sur un contenu vague et indéterminé.
  • Une fois ces clarifications posées, il fallait délimiter les bornes chronologiques du sujet.
  • Les clichés et les simplifications moralisatrices, le discours d’empathie ou d’indignation n’ont pas été rares : il importe donc de rappeler que ce type de propos n’a pas sa place dans une dissertation.

Dissertation de civilisation 2013

Analysez et discutez la citation suivante : "The 1960s [...] legitimized civil disobedience as a tactic in the part of loyal citizens excluded from the conventional channels of power 
and social change." John P.   Diggins, "Civil disobedience in American political thought", in Luther S. Luedtke (ed.), Making America. The Society and Culture of the United States. Washington: USIA, 1987, p. 353.

(agreg externe)

  • La présence à l’écrit, pour la seconde année consécutive, d’un sujet portant sur la contre-culture (l’an dernier, c’était un commentaire de texte), a manifestement surpris plus d’un candidat. Nombreuses furent les copies témoignant d’une impréparation évidente que certains tentèrent de corriger en se cantonnant à des remarques générales — et souvent approximatives — sur la contre-culture et les années soixante, tandis que d’autres sont allés jusqu’à importer leurs connaissances sur Gandhi et la décolonisation, voire même sur la pastorale américaine, pour étoffer leur propos et tomber dans le hors sujet. Rappelons donc en exergue de ces remarques que tout calcul fondé sur une hypothétique alternance des sujets est extrêmement risqué.
  • la question au programme demande donc des connaissances précises : dates, acteurs (...) au sens large du terme mais aussi les principaux hommes politiques de la période, lieux, idées, etc. » Posséder des connaissances à la fois étendues et précises sur la contre-culture et les années soixante est un préalable nécessaire à tout exercice d’analyse, que ce soit pour un commentaire de texte ou une dissertation. Mais les connaissances ne prennent sens que si elles sont triées et organisées en fonction d’une démonstration.(...) Le jury conseille aux candidats dont les connaissances en civilisation américaine sont peu assurées (dates, histoire, fonctionnement des institutions politiques, évènements et figures clés,....) de les réviser avant de se présenter au concours.
  • [Il faut] définir et analyser avec rigueur les termes du sujet. Il importe de prendre en compte l’intégralité des concepts ou des termes d’un sujet citationnel dont tous doivent être clairement définis et aucun considéré comme allant de soi. On ne demande pas nécessairement des candidats qu’ils apportent une réponse définitive aux questions qu’ils se posent, mais on leur reprochera toujours de ne pas se poser de questions du tout. [...] Il faut rappeler que la réflexion sur la citation doit irriguer l’ensemble du travail, et en scander les étapes. Elle ne doit en aucun cas être considérée comme une corvée dont le candidat s’acquitterait dans l’introduction pour ensuite aborder le sujet de son choix et déplier ses connaissances sans se préoccuper du sujet donné.
  • Le plan est l’illustration raisonnée, logique et progressive d’une démonstration, qui elle-même découle d’une problématique précise, c’est-à-dire d’une hypothèse de travail élaborée à partir d’une analyse serrée de la citation. Ces différentes étapes de la construction d’une démonstration, bien que distinctes, sont étroitement liées les unes aux autres. Il en va de même des parties du plan. Si elles sont interchangeables [...] la démonstration ne saurait être considérée comme logique ou progressive. La finalité première de la dissertation n’est pas d’exécuter, souvent de manière mécanique, un plan en trois parties, mais de déployer la réflexion sur la citation et le sujet qui aura été élaborée dans l’introduction.

Dissertation de civilisation 2014

'Dissertation : In every instance of decolonization there existed at least the implied threat of force as well as the willingness to accommodate. At every stage the imperial 
response was subservient to the main objective: defending what could be defended of the empire." Frank Füredi, Colonial Wars and the Politics of Third World Nationalism (1994) 


(agreg externe p 21 : http://cache.media.education.gouv.fr/file/agreg_ext/68/9/anglais_382689.pdf)

Dans leur étude de la citation, les candidats doivent avoir à l’esprit trois grands cadres d’analyse, ou trois grands « défis » :
  • mettre en regard compréhension globale et compréhension détaillée de la citation : une analyse minutieuse de tous les termes de la citation est nécessaire, mais ne doit pas faire perdre aux candidats l’idée directrice proposée par l’auteur ;
  • lorsque l’exercice de dissertation est fondé sur une citation, les candidats doivent, comme pour un commentaire de texte, fonder leur problématique sur la lecture que propose l’auteur de la citation de la question au programme. Ici, il ne s’agissait pas de parler des rapports de force dans la décolonisation britannique en général mais de proposer une lecture nuancée de l’analyse critique que Füredi lui-même opère dans ce passage. Nous y reviendrons plus loin, mais cela signifie que les candidats doivent travailler à mettre en regard deux problématiques (celle de l’auteur sur la question au programme et la leur propre sur le point de vue de l’auteur) – et revenir donc fréquemment, au cours de leur dissertation, aux termes de la citation.
  • le paratexte ne doit pas être ignoré, sans pour autant que l’analyse soit totalement subordonnée (surtout si l’auteur n’est a priori pas connu des candidats, comme c’était ici le cas ; il s’agit alors de procéder à une analyse prudente, et de justifier clairement les hypothèses/analyses émises).



Dans la présentation de la leçon, le rapport précise ( http://cache.media.education.gouv.fr/file/agreg_ext/68/9/anglais_382689.pdf p 106):

Il existe deux types de sujets de leçon et chacun d’entre eux nécessite une méthodologie particulière : il s’agit des sujets notionnels ou des sujets citationnels.

  • Un sujet notionnel peut porter sur une seule notion, comme dans les exemples suivants : « Innovation in the Roosevelt years » ou « Centralization in the Roosevelt years ». Dans le cas d’un sujet à une seule notion, il faut tout d’abord analyser en profondeur le terme proposé par le jury en envisageant comment l’antonyme peut s’insérer dans la problématique. Une autre astuce est de chercher à décomposer le mot ou à en analyser l’étymologie. (…) Le plus souvent, les sujets notionnels demandent d’articuler deux, voire plusieurs notions. Dans ce cas-là, le terme le plus important est sans doute « and » qui vient relier deux mots-clefs. Par exemple, dans le sujet « Democracy, progress and parks in Frederick Law Olmsted’s thought and action », un candidat qui aurait traité les trois termes séparément se serait vu attribuer une mauvaise note car c’est bel et bien l’articulation des trois notions qui peut permettre au candidat de proposer une problématique pertinente. (…) Dans tout sujet à plusieurs notions, il faut donc articuler celles-ci, les faire jouer les unes avec les autres en les reliant ou en les opposant mais en aucun cas en les séparant.
  • Les sujets les plus courants sont les sujets citationnels. (…) Le premier réflexe du candidat doit être de prêter une attention particulière au paratexte : si ce dernier est fourni par le jury, c’est qu’il contient des informations utiles qui servent de piste à l’interprétation de la citation. Il faut commenter le titre de l’ouvrage, la date de publication en évitant les longues digressions hors-sujet qui ne s’inscrivent pas dans la problématique spécifique du sujet proposé.

Le deuxième réflexe méthodologique à adopter, une fois le paratexte analysé, est le repérage des termes importants du sujet. Comme dans un sujet notionnel, aucun terme n’est a priori plus important qu’un autre, même dans une longue citation. (…) Mettre de côté des pans entiers de la citation mène à une impasse et empêche de mener une réflexion sur le point de vue de l’auteur. En dépit des nombreux conseils relatifs au point de vue de l’auteur dans les rapports précédents, de trop nombreux candidats ne savent toujours pas comment l’aborder. Ils estiment, à tort, qu’un historien se doit d’être objectif et critiquent donc toute notion de point de vue en estimant qu’ils peuvent corriger la vision biaisée d’un historien en tentant de rétablir une objectivité illusoire. Il ne sert à rien de critiquer un historien pour son manque d’objectivité ; en revanche, essayer de montrer comment sa méthodologie, son idéologie, ou son inscription historiographique, influencent son point de vue est autrement plus pertinent. (…) Les mouvements historiographiques ne s’enchaînent pas de façon statique mais se répondent et se remettent en cause, rendant ainsi plus complexe l’interprétation qui peut être faite d’une personnalité historique ou d’un événement. En Civilisation, la leçon à l’oral est un exercice très proche de celui de la dissertation à l’écrit. Il s’agit d’utiliser des connaissances précises pour illustrer et critiquer un propos singulier.

  • La problématique, terme ô combien honni des candidats, découle d’une analyse approfondie du paratexte et de tous les termes du sujet. Le plan, quant à lui, doit être envisagé comme une démonstration de plus en plus fine de la réponse apportée à la problématique. Un plan est statique quand il traite séparément des termes du sujet ou quand il se contente de juxtaposer différentes idées sans réelle évolution de la démonstration. Il devient dynamique quand les parties s’articulent entre elles et offrent des réponses partielles à la problématique initiale. Une leçon débute donc par une introduction claire reformulant efficacement le sujet en analysant ses termes importants et son paratexte. Une introduction contient nécessairement une problématique, c’est-à-dire un angle d’approche du sujet, et l’annonce d’un plan. Ce dernier doit comporter plusieurs parties, de longueur à peu près égale et clairement indiquées par des transitions. Lors de certaines prestations, le jury a eu beaucoup de mal à percevoir quand le candidat passait d’une partie à une autre. Étonnamment, dans quelques cas, les première et troisième parties étaient très courtes, alors que la deuxième couvrait près de la moitié des trente minutes que doit durer l’exposé. Toute bonne conclusion reprend la problématique initiale en revenant précisément au sujet lui-même de façon à y apporter une réponse claire.

Dissertation de civilisation 2018

Analysez et discutez la citation suivante : "Right up until the last days of 1979 general election, Margaret Thatcher was not the only possible answer to the questions the decade posed." 
Andy Beckett, When the Lights Went Out. What Really Happened to Britain in the Seventies [2009], London, Faber & Faber, 2010, p.5.

Rapport agreg externe

  • L’analyse du sujet, qui précède toute élaboration de problématique et de plan, est essentielle car elle guide la sélection des connaissances qui seront développées au cours de la dissertation. Lorsque le sujet est constitué d’une citation, tous ses termes doivent être pris en compte, faute de quoi la dissertation risque d’être en partie hors sujet. Plusieurs copies se sont contentées de proposer une analyse partielle de la citation, en la réduisant à certains mots-clés (…). Or une citation ne peut être réduite à un sujet de type notionnel (…) L’analyse des termes du sujet constitue un préalable à l’élaboration de la problématique qui doit en découler de manière logique, de même que l’annonce du plan doit procéder de la problématique dans une progression explicite. En outre, le sens des termes de la citation doit être expliqué de façon claire et concrète, en évitant les phrases inutilement complexes, surtout en introduction, car elles obscurcissent le propos plus qu’elles ne l’enrichissent. (…)
  • L’annonce de plan doit elle aussi être la plus claire possible, sans pour autant être simpliste. Surtout, le développement doit être en accord avec l’annonce du plan, et les différentes parties doivent correspondre à ce qui a été dit dans l’introduction. Pour cette raison, il est souhaitable que les candidats reviennent régulièrement aux termes de la citation, au cours de leur argumentation.
  • Un autre défaut méthodologique consiste à évacuer totalement le paratexte qui accompagne la citation. Certaines copies ont proposé une analyse des termes de la citation dans l’introduction, mais ont oublié d’en présenter l’auteur et la source. Or, l’étude de ces éléments offre souvent des clés de lecture. Dans le cas du sujet proposé, la citation était tirée d’un ouvrage présenté comme une lecture essentielle dans la bibliographie de référence, que les candidats devaient donc être en mesure de présenter. Toutefois, même sans connaissances précises sur la source, la date de publication suggérait [une] dimension historiographique de la citation. Or beaucoup de copies se sont cantonnées à l’étude de la citation dans sa dimension politique (…), oubliant que l’auteur exprime un point de vue qu’il s’agit d’expliciter et de mettre en contexte. À la question soulevée par les années 1970, les candidats devaient donc apporter une réponse double, à la fois politique et historiographique.
  • (…) Il était donc essentiel d’intégrer une réflexion historiographique à l’étude de la citation. On voit bien pourquoi il est conseillé aux candidats de toujours réfléchir à la source de la citation et à son contexte de production, et de ne jamais laisser de côté le pointe vue et l’idée directrice proposés par l’auteur. Le titre de l’ouvrage peut lui aussi offrir d’intéressantes clés d’analyse. [Ici, la] formulation du titre reflète la nature de l’ouvrage (une histoire populaire, destinée au grand public), il n’est guère utile d’en proposer une analyse d’ordre stylistique.
  • Le jury souhaite également attirer l’attention des candidats sur l’importance du plan, qui doit permettre aux différentes parties du développement de s’enchaîner de façon logique. La dissertation se distingue du simple exposé par le fait de proposer une démonstration, et non un développement factuel ou descriptif. Les différentes parties doivent donc s’organiser en fonction d’une argumentation et, idéalement, présenter des longueurs similaires. Les plans mécaniques (du type: I.La crise économique; II.La crise sociale; III.La crise politique), relèvent de l’exposé et ne correspondent pas aux exigences de la dissertation. En plus de proposer un simple catalogue, qui confine souvent à la récitation de cours, de tels plans sont à proscrire parce qu’ils ne procèdent pas de l’analyse de la citation, étant simplement plaqués sur le sujet. Les plans chronologiques, qui ne découleraient pas non plus de l’analyse de la citation, seraient tout aussi peu recevables. La citation ne justifiait pas un plan en trois parties correspondant aux trois gouvernements des années 1970 (…) La dissertation de civilisation ne saurait en effet se réduire à un récit événementiel, qu’il soit chronologique ou thématique, et encore moins à une énumération d’informations (…). Les copies ne sont pas évaluées selon le nombre de connaissances exposées, mais en fonction des connaissances choisies pour étayer une démonstration à partir de l’analyse des termes du sujet, et autour de concepts-clés plutôt que de faits historiques.
  • Il est essentiel pour les candidats de maîtriser les enjeux centraux du programme, c’est-à-dire de savoir les employer à bon escient, de pouvoir les définir de façon précise, et d’en connaître l’équivalent (et l’orthographe) dans les deux langues, française et anglaise. (…). Une autre erreur méthodologique relève de l’anachronisme. Le programme s’arrêtant en 1979, le jury a regretté de trouver dans certaines copies des développements d’une certaine ampleur sur les politiques adoptées par le Premier ministre Thatcher dans les années 1980 (certaines copies ayant même consacré une sous-partie ou une partie entière à faire le bilan des « années Thatcher » et du « Thatchérisme » en action).
  • Un dernier écueil de la dissertation de civilisation consiste à porter des jugements de valeur sur les acteurs historiques de la période au programme et, notamment dans le cas qui nous concerne, sur la personne et l’idéologie de Margaret Thatcher, ou sur la personne et le bilan politique des trois premiers ministres britanniques des années 1970.
  • (…)Enfin, comme le soulignaient les rapports précédents sur l’épreuve de la dissertation en français, une excellente maîtrise des deux langues, la langue anglaise mais aussi la langue française, fait partie des exigences de l’exercice et donc du concours. Dans de trop nombreuses copies, un français approximatif (syntaxe, orthographe) freine la compréhension du lecteur et peut parfois conduire le candidat à de dommageables contresens. Beaucoup de candidats n’ont pas su écrire correctement des mots aussi essentiels au programme que « décennie » (à ne pas confondre avec « décade »), « parti » (politique) et « référendum », ainsi que des mots aussi essentiels pour un enseignant d’anglais que le nom des pays anglophones (Royaume-Uni, Grande-Bretagne, pays de Galles, Irlande) ou le nom de leurs habitants (Britanniques / britanniques, selon qu’il s’agit d’un nom ou d’un adjectif). Rappelons aussi qu’on ne peut pas parler d’« Irlande » pour la seule Irlande du Nord, ni d’« Angleterre» pour le Royaume-Uni dans son ensemble. Il va sans dire qu’un futur enseignant doit savoir faire la différence entre a/à, du/dû/dut/dût, eu/eut, ou encore quelque/quel que/ quelle que/quelles que/quels que.
  • Par ailleurs, il est conseillé d’adopter une écriture clairement formée, et de signaler dans la présentation de la dissertation les passages clés de la démonstration (introduction, parties du développement et conclusion qui se détachent les unes des autres grâce à des sauts de ligne plus ou moins marqués). Les titres de parties et de sous-parties ne devant pas apparaître dans les copies puisqu’il ne s’agit pas d’un plan rédigé, il est conseillé de veiller à ce que les grandes lignes de l’argumentation se détachent clairement sur le papier (même si, bien entendu, ces points purement formels ne sont là que pour mieux mettre en valeur les transitions et l’enchaînement logique des arguments présentés).Enfin, comme tous les ans, le jury conseille vivement aux candidats de prendre le temps de procéder, en fin d’épreuve, à une relecture minutieuse de leur copie afin de corriger toute étourderie

Liens extérieurs